Tuesday, September 9, 2008

Aloysius Bertrand

Né dans le Piemont, le 20 avril 1807, c’est a Dijon, où son père, officier de gendarmerie, s'est installé après sa mise à la retraite, au début de la Restauration, que Bertrand passe la majeure partie de sa vie, il trouvera une grande partie de son inspiration dans les rues et les monuments de cette ville. Reconnu comme un poète maudit, il deviendra l'inspirateur de Charles Baudelaire, qui avouera que la tentation lui vint d'écrire Le Spleen de Paris après bien des lectures de Gaspard de la nuit, qu'il admirait beaucoup, ainsi que, plus tard, des surréalistes.

LA CHANSON DU MASQUE

Venise au visage de masque
LORD BYRON

Ce n'est point avec le froc et le chapelet, c'est avec le tambour de basque et l'habit de fou que j'entreprends, moi, ce pèlerinage à la mort!

Notre troupe bruyante est accourue sur la place St-Marc, de l'hôtellerie du signor Arlecchino, qui nous avait tous conviés à un régal de macarons à l'huile et de polenta à l'ail.

Marions nos mains, toi qui, monarque éphémère, ceins la couronne de papier doré, et vous, ses grotesques sujets, qui lui formez un cortège de vos manteaux de mille pièces, de vos barbes de filasse et de vos épées de bois.

Marions nos mains pour chanter et danser une ronde, oubliés de l'Inquisiteur, à la splendeur magique de girandoles de cette nuit rieuse comme le jour.

Chantons et dansons, nous qui sommes joyeux, tandis que ces mélancoliques descendent le canal sur le banc des gondoliers, et pleurent en voyant pleurer les étoiles.

Dansons et chantons, nous qui n'avons rien à perdre, et tandis que, derrière le rideau où se dessine l'ennui de leurs fronts penchés, nos patriciens jouent d'un coup de cartes palais et maîtresses!